30 km/h comme règle, 50 km/h comme exception, pour une meilleure qualité de vie en ville
Nathanaël Bruchez, Responsable mobilité
Si nous voulons préserver paysages, espaces verts et terres cultivables, le développement de l’habitat ne pourra continuer à se faire que dans les régions déjà urbanisées. Cette intention a été validée par le peuple suisse en 2013, avec l’adoption de la révision de la loi sur l'aménagement du territoire (LAT). Dans ce contexte, une meilleure utilisation et répartition de l’espace disponible s’avère indispensable.
Le 30 km/h s’inscrit parfaitement dans cette logique. Son déploiement rapide au niveau européen, dans les pays scandinaves, en France, en Autriche, en Espagne ou encore dans les pays du Bénélux, ne laisse planer aucun doute : il s’agit d’une tendance lourde, qui ne s’arrêtera pas à nos frontières. Afin d’accompagner ce développement et de réduire les coûts et démarches administratives qui caractérisent la situation actuelle, les obstacles au 30 km/h doivent être levés.
Le 30 km/h aussi sur des axes principaux
S’il est devenu plus simple d’instaurer une zone 30 dans les quartiers depuis le 1er janvier 2023, abaisser la vitesse sur des axes principaux demeure encore laborieux, même lorsque les avantages de cette mesure sont évidents. Par ailleurs, la différenciation opérée par le Conseil fédéral entre « axes non orientés trafic » dans les quartiers et « axes orientés trafic » ailleurs ne se justifie pas. En effet, nombre d’axes « orientés trafic » se situent proches des centres, aux abords d’écoles, de crèches ou de homes ou encore dans des zones résidentielles. Axer les "routes orientées trafic" en priorité sur les besoins du trafic motorisé va donc à l’encontre des multiples exigences auxquelles doivent répondre les rues en ville.
Dans l’optique de requalifier l’espace public et de rendre les villes plus agréables à vivre, instaurer une limitation à 30 km/h sur les axes principaux constitue une intervention tout à fait judicieuse. D’une part, cet abaissement de la vitesse permet de réduire le gabarit de la chaussée, libérant ainsi des espaces précieux qui peuvent être mis à disposition de la marche, du vélo, des transports publics ainsi que pour la création d’espaces verts. D’autre part, passer de 50 à 30 km/h engendre une diminution du bruit à la source, permettant ainsi de se rapprocher des valeurs limites d’exposition au bruit prescrites dans l’ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB). Par ailleurs, le 30 km/h raccourcit considérablement les temps de réaction et la distance de freinage, permettant de réduire d’environ un tiers les accidents graves. Il améliore également la coexistence entre les différents utilisateurs et utilisatrices de l’espace public : les traversées piétonnes sont rendues plus sûres et le vélo gagne en attractivité grâce à une coexistence plus paisible avec le transport individuel motorisé. Enfin, le 30 km/h sur des axes principaux permet de fluidifier le trafic, réduisant la quantité et la magnitude des manœuvres d’accélération et de freinage des automobilistes, et facilitant l’accès par les rues latérales.
Dialogue et solutions pour les transports publics
Avec la marche et le vélo, les TP constituent l’un des trois piliers d’une mobilité urbaine durable. Ensemble, ils forment une « alliance environnementale ». La CVM s’engage à maintenir et à développer une offre de TP attractive et de qualité, ce mode de transport étant peu gourmand en espace.
Les transports publics (TP) sont aussi concernés par les réductions de la limitation de vitesse de 50 à 30 km/h sur les axes principaux. La hiérarchie des réseaux n’est en revanche aucunement menacée, les axes principaux concernés conservant leur fonction de canalisation du trafic.
Les éventuelles pertes de temps pour les TP peuvent être atténuées par des mesures ciblées. En premier lieu, la priorité des TP sur le TIM peut être renforcée de manière systématique : priorité aux feux de circulation, sites propres, suppression des carrefours, arrêts sur chaussée, réduction du TIM grâce à l'orientation et à la gestion du trafic, etc. Ensuite, les villes peuvent renoncer à toutes mesures de modération entravant la circulation des TP sur les axes principaux limités à 30 km/h. En outre, la limitation de vitesse peut varier selon le moment de la journée, et le 30 km/h peut être instaurée sur certains tronçons de manière ciblée. A noter que même si le 30 km/h devient la norme, la possibilité d’instaurer exceptionnellement le 50 km/h sur certains axes serait maintenue. Enfin, si le passage à 30 km/h devait entraîner des coûts supplémentaires pour les transports publics, ce qui doit être examiné par les villes au cas par cas, une solution de financement doit être recherchée dans le cadre d'un dialogue avec les différents acteurs concernés.
« Zone 30 » ou « axe limité à 30 km/h » ? Une zone 30 supprime toute hiérarchie des routes. La priorité de droite s’y applique et elle n’autorise la mise en place de passages piétons que sous certaines conditions (proximité d’une école ou d’un home pour personnes âgées). Elle est aménagée dans un esprit de cohabitation et de telle sorte que le trafic de transit ne soit pas attractif.
Un axe limité à 30 km/h conserve son caractère hiérarchique supérieur. Il demeure prioritaire par rapport aux axes secondaires, autorise les passages piétons et ne doit pas nécessairement être aménagé différemment d’un axe à 50 km/h. Des aménagements peuvent en revanche être réalisés dans les rues adjacentes afin de dissiper les craintes de diffusion du trafic. Depuis le 1er janvier 2023, le tronçon d'une "route affectée à la circulation générale" dont la vitesse maximale est limitée à 30 km/h peut être inclus dans une zone 30. |