Garder son logement : un enjeu majeur de plus pour les personnes à l’aide sociale
Depuis plusieurs années, le marché du logement est très tendu en Suisse, avec un taux de vacance souvent en dessous de 1% dans certaines régions. Ce contexte représente un enjeu majeur et croissant pour les personnes à l’aide sociale. Dans un tel marché, l'offre de logements abordables et de logements sociaux est très limitée. Ce constat est formulé de manière unanime par les services sociaux des villes suisses participant à l’étude « Logement et aide sociale » présentée dans le rapport annuel de l'Initiative des villes pour la politique sociale.
Par ailleurs, seize des vingt villes interrogées indiquent que le nombre de personnes menacées de perdre leur logement a augmenté au cours des cinq dernières années, touchant particulièrement les bénéficiaires de l’aide sociale. « Outre les contraintes financières qui limitent les chances de trouver un logement, la stigmatisation liée notamment au recours à l’aide sociale, à l’origine ou à l’existence de poursuites complique les chances de trouver un logement pour les personnes à faible revenu », explique Michelle Beyeler, professeure associée en sciences politiques à l'Université de Zurich et autrice du chapitre « Logement et aide sociale ». Ces difficultés peuvent avoir des conséquences négatives sur l’emploi, la scolarisation des enfants ou encore la vie sociale. De plus, les bénéficiaires de l’aide sociale sont souvent les premières touchées par les expulsions sur le marché du logement.
Pour y faire face, les services sociaux déploient des dispositifs particuliers pour permettre à leurs bénéficiaires de trouver ou conserver un logement stable. Parmi les outils utilisés figurent l’augmentation des normes de prise en charge des loyers ou encore les aides financières ponctuelles. « Mais la marge de manoeuvre est limitée », explique Nicolas Galladé président de l’Initiative des Villes pour la politique sociale, « car la pénurie de logements est un problème général que l'aide sociale ne peut pas résoudre ».
A cela s’ajoute la revalorisation systématique de logements qui induit des hausses continues et souvent non justifiées des loyers. « L’immense majorité des bénéficiaires de l’aide sociale sont locataires. Les aider à faire valoir leurs droits notamment pour s’opposer aux hausses injustifiées du loyer, c’est leur permettre de conserver un logement à loyer abordable et leur vie sociale locale » appuie Émilie Moeschler, vice-présidente de l’Initiative des Villes pour la politique sociale. Dans ce but, les villes activent plusieurs leviers, comme les services de conseils et d’accompagnement pour les locataires. Émilie Moeschler ajoute, « lutter contre les phénomènes de type spéculatif, c’est aussi limiter les coûts assumés par les pouvoir publics ».
Renforcer le monitoring dans le domaine du logement
Les évaluations systématiques sur le thème « logement et aide sociale » sont rares dans les villes suisses, c'est pourquoi la mise en place d’un monitoring fiable est nécessaire. Cette étude de l’Initiative des Villes pour la politique sociale représente ici une première étape dans cette direction. En plus des 14 villes participant régulièrement au rapport (dont Bienne et Lausanne), six autres villes de Suisse romande ont participé à l'enquête sur la situation du logement : Genève, Neuchâtel, Fribourg, La Chaux-de-Fonds, Sion et Yverdon. Les enjeux sont globalement comparables à ceux de la Suisse alémanique.
Aide sociale stable et modernisation de la statistique de l'aide sociale
Le taux d'aide sociale n'a pratiquement pas changé l'année dernière, avec un écart de -0,1% par rapport à l'année précédente pour l'ensemble des quatorze villes évaluées. Il était de 2,8% en 2023, et pour l'ensemble de la Suisse. A noter que les taux d'aide sociale sont généralement plus faibles dans les zones rurales que dans les centres urbains.
La partie standard du rapport sur les indicateurs est rédigée chaque année par l'Office fédéral de la statistique. Les statistiques de l'aide sociale sont actuellement dans un important processus de modernisation. Cette transition a pour conséquence que les changements intervenus entre 2023 et 2024 se traduisent par des chiffres peu significatifs, qui doivent être interprétés avec prudence.
Cette modernisation présente toutefois des avantages : dans le futur, les chiffres pourront être évalués plus rapidement et des comparaisons plus précises seront possibles. Le rapport sur les indicateurs est un instrument indispensable pour l'aide sociale.
Bon à savoir
Le taux d'aide sociale indique la proportion de bénéficiaires de l'aide sociale par rapport à la population résidente permanente au cours d'une année civile. Sont considérées comme bénéficiaires de l'aide sociale au cours d'une année civile toutes les personnes qui ont reçu une aide financière de l'aide sociale pendant au moins un mois.
L’essentiel en bref
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