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Dans le domaine de l’aide sociale, on ne voit pas le bout de la crise: expériences des services sociaux d’une petite ville

2 juin 2021 – La pandémie de coronavirus a aussi des répercussions sur le travail dans le domaine de l’aide sociale. Jusqu’à fin 2020, on n’a constaté qu’une légère hausse du nombre de personnes bénéficiant d’un soutien. Depuis, les cas ne cessent d’augmenter, et il est probable que cette tendance perdure. La pandémie est donc appelée à occuper les services sociaux communaux pendant encore longtemps, écrit Stefan Bütikofer, le conseiller communal de Lyss en charge de ce domaine.

Stefan Bütikofer, conseiller communal Affaires sociales et société, Lyss BE

 

En prenant la plume en qualité de conseiller communal responsable pour parler des répercussions de la pandémie sur les services sociaux dans la rubrique «Après le covid», je remarque tout d’abord que l’intitulé de la rubrique est pour le moins trompeur. Mis à part les conditions de travail, les répercussions de la pandémie étaient jusqu’ici relativement limitées. Toutefois, depuis le début de l’année, la situation a changé, et le nombre de nouvelles inscriptions est en constante augmentation. Malheureusement, il faut partir du principe que cela va encore durer un bon moment. En ce qui concerne l’aide sociale, nous nous trouvons encore au milieu de la crise.

 

Des répercussions directes sur le travail des services sociaux

 

Naturellement, la crise du coronavirus a eu chez nous aussi, à Lyss, des répercussions directes, dont les effets se sont fait sentir immédiatement. Elle a notamment impacté directement le travail avec nos clientes et clients: pendant la première vague, les entretiens sur place n’étaient pas possibles. Les collaboratrices et collaborateurs ne pouvaient conseiller leurs clientes et clients que par téléphone, à partir de chez eux. Dans l’intervalle, ces entretiens ont à nouveau lieu sur place. Le télétravail reste toutefois obligatoire, autant que faire se peut: au maximum la moitié des collaboratrices et collaborateurs travaillent actuellement au bureau. Nous avons essayé de laisser autant que possible intacts les plannings hebdomadaires, de sorte à permettre un certain retour de la normalité malgré la situation exceptionnelle. Il devrait toutefois y avoir suffisamment de flexibilité pour pouvoir organiser les consultations.

 

Notre service social travaille sur un mode polyvalent, ce qui signifie que les consultations sociales et la protection de l’enfant et de l’adulte (PEA) sont assurées par le même service. Il y avait à cet égard des craintes que les cas du domaine de la PEA n’augmentent fortement après les restrictions de la première vague. Heureusement, cela n’a pas été le cas, les chiffres sont à un niveau similaire à ceux de l’année précédente. (73 examens de situation en 2019 et 78 examens en 2020). Cela ne signifie toutefois pas que la pandémie n’a eu aucune répercussion sur les familles. Par exemple, nous constatons que les consultations de travail social en milieu scolaire ont augmenté, notamment après les vacances d’été de l’année dernière. Durant cette période, il y a en temps normal généralement moins de besoin de soutien. Nous supposons qu’à cet égard aussi, la crise s’est traduite par une recrudescence des tensions au sein des familles.

 

Au début de la pandémie, nous n’avons eu que quelques nouvelles inscriptions de clientes et clients. Les mesures de soutien de la Confédération et du canton ainsi que l’assurance-chômage ont réussi à amortir une grande partie de la détresse. Le nombre de personnes bénéficiant d’un soutien a tout de même légèrement augmenté pour la première fois depuis ces dernières années, passant de 773 personnes fin 2019 à 837 fin 2020. Les raisons de cette hausse sont au moins pour partie liées à la pandémie de coronavirus. Nous avons constaté des inscriptions de travailleurs indépendants et de personnes qui venaient tout juste de sortir de l’aide sociale. Dans ces cas, aucun autre filet de protection sociale ne venant s’appliquer, ces personnes se sont adressées directement à nous.

 

Une hausse continue des nouvelles inscriptions depuis le début de l’année

 

Depuis début 2021, les inscriptions à l’aide sociale ont continué à augmenter, comme nous nous y attendions, d’ailleurs. Ainsi, entre janvier et avril, 80 nouveaux dossiers avaient été ouverts, alors que dans le même temps, environ 60 avaient pu être fermés.

 

Nous prévoyons que le point culminant de cette évolution n’a pas encore été atteint et que les chiffres vont continuer à augmenter. En 2020, le taux de chômage a augmenté de 46,3 % dans le canton de Berne (en Suisse: de 39,5 %), et cette hausse a à présent des effets différés sur les services sociaux. Il est très difficile de prévoir combien de temps cela perdurera. On prévoit aussi un effet décalé de deux ans, quand une partie des personnes tombées au chômage pendant la pandémie arriveront en fin de droits. D’autres facteurs, comme par exemple l’évolution de l’économie, ont aussi une influence sur le nombre d’inscriptions aux services sociaux.

 

Nous surveillons actuellement la situation de très près pour pouvoir prendre des mesures en temps utile. Un nombre plus élevé de cas signifie par exemple qu’il faut aussi davantage de ressources en personnel dans la consultation sociale. À cet égard, la planification doit donc avoir lieu d’autant plus tôt, afin de pouvoir augmenter en temps utile le pourcentage d’occupation ou d’embaucher de nouveaux collaborateurs et collaboratrices. Il est important, tant pour les clientes et clients que pour le personnel, que la charge de travail liée au nombre de cas ne devienne pas trop importante. Cela permettra de garantir le maintien de la qualité élevée du conseil social en veillant à ce que les bénéficiaires de l’aide sociale continuent à recevoir un bon accompagnement et que la charge de travail du personnel ne devienne pas excessive.

 

Les sorties de l’aide sociale deviennent plus difficiles

 

Un autre aspect qui continuera probablement à occuper encore longtemps les services sociaux est la question de la sortie de l’aide sociale. En règle générale, cette sortie est possible si les clientes et clients retrouvent un emploi ou s’ils passent sous la responsabilité d’une autre assurance sociale. Il peut par exemple s’agir de l’AVS si l’âge de la retraite est atteint ou de l’AI si une incapacité permanente de travail est diagnostiquée. Nous remarquons que depuis l’année dernière, il est devenu plus difficile pour nos clientes et clients de trouver un nouvel emploi. La pandémie de coronavirus joue probablement aussi un rôle dans ce contexte. De nombreuses entreprises s’attendent elles-mêmes à un avenir incertain et embauchent donc moins de personnes. En conséquence, nos bénéficiaires de l’aide sociale restent plus longtemps tributaires d’un soutien et doivent être pris en charge par le service social pendant une période d’autant plus longue. Là encore, il est difficile de prévoir combien de temps cette situation est appelée à durer. Il faut espérer que l’économie va se redresser rapidement et que de nouveaux emplois pourront à nouveau être créés. Mais on ne peut malheureusement pas partir du principe que ce sera le cas dans tous les secteurs. Dans le tourisme en particulier, il est à craindre que les conséquences de la pandémie se fassent sentir pendant encore un certain temps.

 

La santé des bénéficiaires de l’aide sociale pâtit

 

Pour nos bénéficiaires de l’aide sociale, la situation est tout sauf facile. Leurs contacts, déjà rares en temps normal, sont encore plus restreints, et les espoirs d’une amélioration rapide de leur situation s’amenuisent. Les offres d’insertion professionnelle ont elles aussi dû être suspendues, voire supprimées, à cause du coronavirus. Les travailleuses et travailleurs sociaux ont également pour tâche de soutenir et de montrer des perspectives, même si cela est difficile pour le moment. Et ce bien qu’il soit désormais possible de procéder à de nouvelles ouvertures et que la lumière au bout du tunnel devienne plus intense. Le travail des services sociaux ne fait que commencer.

 

«Après le covid: les voix des villes» paraît chaque mercredi. Cette série est l’occasion pour des experts de différents domaines de prendre position sur les thèmes les plus brûlants de l’actualité du point de vue des villes (s'abonnner).

 

Stefan Bütikofer est conseiller communal Affaires sociales et société, Lyss BE

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