DE
<< retour

Comment réussir la diversité culturelle?

19 décembre 2023 – L’être humain a besoin de culture. C’est une évidence que chacun-e peut approuver. Mais il se trouve que le consensus s’arrête là. Qu’est-ce que la culture, au juste? Le point fort de Walter Leimgruber, président de la Commission fédérale des migrations et professeure de l'Uni de Bâle.

Walter Leimgruber, président de la Commission fédérale des migrations et professeur dans le dép. des sciences de la culture et  d’ethnologie européenne de l'Université de Bâle.

 

L’être humain a besoin de culture. C’est une évidence que chacun-e peut approuver. Mais il se trouve que le consensus s’arrête là. Qu’est-ce que la culture, au juste? Et qui, de fait, est responsable de la promotion de la culture et de la participation de groupes de population aussi larges que possible? La politique culturelle, quel qu’en soit l’échelon, est empreinte de beaux principes qui, dans la vie quotidienne, ne sont guère pris en considération. 

 

Des études montrent régulièrement que la participation à la vie culturelle dépend du niveau d’instruction, du revenu et des origines. Les institutions et les projets culturels subventionnés attirent une frange relativement restreinte de la population. Ce groupe dispose quant à lui d’une suprématie en matière culturelle, car il dicte, aussi bien politiquement, pécuniairement et intellectuellement, ce qui relève de la culture digne d'être encouragée et ce qui ne l'est pas. On constate très clairement que les migrantes et migrants, par exemple, participent très peu à la vie culturelle et que les conceptions plutôt populaires ou traditionnelles de la culture, ou qui misent moins sur le professionnalisme et l'innovation, ne bénéficient que de peu de soutien. 

 

 On constate très clairement que les migrantes et migrants participent très peu à la vie culturelle


Depuis quelques années s’est toutefois amorcé un changement de mentalité, partout il est question de participation et d’implication culturelles de couches sociales aussi larges que possibles. Ainsi des comités se remettent à élaborer des stratégies fondées désormais sur une exigence de diversité. Or, la revendication uniforme d’une diversité où toutes les institutions célèbrent le même type de pluralité aura un effet tout aussi monotone sur le contenu et tout aussi négatif sur la participation de groupes très divers que la politique menée jusqu'à présent. Car une fois de plus, un groupe qui se considère comme une élite a imposé ses idées. Cela perpétue toutefois ce qui a toujours caractérisé la politique culturelle: la gestion par ceux qui ont le pouvoir d'imposer leur définition de la culture.  

Or, l’enjeu de la participation culturelle va au-delà de la simple promulgation de nouvelles directives en matière de diversité. Il ne suffit en effet pas que des institutions culturelles cherchent de manière condescendante à gagner de nouveaux publics, à abaisser les seuils d’accès et à intensifier leur travail de médiation. Elles doivent bien davantage permettre aux personnes de donner leur avis, de prendre part aux décisions et aux processus. Il en découle toutefois une perte de contrôle pour les promoteurs et gestionnaires culturels. Toute forme de pilotage leur devient ainsi plus difficile. Les enjeux résident dans la participation en termes de programmes, processus, personnel, partenariats et public, de même que dans l’accès aux instruments de promotion et de conception. En fin de compte, la notion de participation signifie donc aussi partage du pouvoir. Et c’est manifestement ce qui pose trop souvent des problèmes aux institutions culturelles et aux «responsables culturels».

  ·  
+41 78 739 78 16
  ·  
info@aegerter-holz.ch